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4 juillet 2017

Toujours plus loin, toujours plus haut, toujours plus fort !

schizo jeun's

Belle devise pour le jeu télévisé FORT-BOYARD qui, depuis 1990, chasse le trésor avec générosité, en soutenant de magnifiques projets associatifs, tels Perce-Neige (association d’utilité publique fondée par LINO VENTURA, pour le soutien des personnes handicapées mentales, et de leurs familles), Le Refuge (contre l’isolement social des jeunes), et tant d’autres.

Oui mais…

En 1965, quand Lino Ventura lance, sur les écrans de l’ORTF, l’appel d’un père en détresse face au manque de moyens pour la prise en charge de Linda, son « enfant différent », c’est avec gravité et émotion…

On ne joue pas avec la souffrance, même pour déstigmatiser, on ne joue pas avec les clichés, même pour vulgariser.

L’ « asile »

« L’asile », c’est le nom de la nouvelle épreuve que l’’émission Fort-Boyard propose en saison 2017…
Innovation qui sera suivie par des millions de foyers, sur un créneau de grande audience familiale.

On ne joue pas avec la souffrance. On peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui, ni n’importe comment. Une camisole de force, une cellule capitonnée. Mais au fait, à quoi joue-t-on ?

Il faut savoir raison garder. Un combat, pas un jeu, mais un parcours médical particulier, beaucoup plus souvent dans le cadre d’une thérapie, avec des phases dépressives, des éclaircies, des aidants qui apprennent la vie autrement… et ne souhaitent assister à cette sombre dérision grotesque.

L’ « Asile », les clés, -bien sûr !-, l’enfermement du « monstre ancestral», celui qui déconcerte, celui qui dérange, sa dé-sociabilisation, quand tant de belles personnes œuvrent pour le contraire.

Alors c’est NON !

Au nom de nos enfants, au nom de leurs parents et proches, nous, association SCHIzo’Jeun’S, refusons cette caricature d’un univers psychiatrique encore trop méconnu en France.

A l’instar de l’UNAFAM*, nous exigeons le retrait de ce « programme divertissant ».

L’isolement, la contention, les soins intensifs, prodigués avec parcimonie en hôpital psychiatrique pour des patients, -et non plus en « asile » pour des fous,- n’en restent pas moins parfois nécessaires, pour contraindre les bouffées d’angoisses délirantes d’un malade éperdu et souvent suicidaire. Cette mesure de dernier recours renvoie le patient esseulé à sa psychose déchirante, obstacle déjà suffisamment traumatisant, sans que la télévision publique ne le souligne en prime !

En matière de psychiatrie, on évitera de surfer sur de vieux fantasmes anxiogènes, même avec la meilleure intention qui soit, au risque de les alimenter, et d’aviver des souffrances déjà si invalidantes…. Communiquer, plutôt que prétendre distribuer l’altruisme, c’est d’abord écouter. Tenter de comprendre l’autre, sans négliger ses interprétations personnelles, parfois très déstructurantes.

Quels experts avez-vous mandatés pour filtrer les messages transmis, et dans quels objectifs? De l’audimat, de la médiatisation, ou bien de l’aide réelle de près de 600 000 Français diagnostiqués schizophrènes, 1/10 touchés de près ou de loin par la maladie mentale, comme moi. Comme vous peut-être ?

Que dire du malade qui essouffle et craint de consulter ; de l’enfant qui doit se rendre en Unité Spécialisée pour y être médicamenté sous contrôle ; de celui à qui l’on propose une représentation grossière et terrifiante du lieu de soin de son parent…

Parler de la maladie mentale, OUI . En délicatesse et dans le respect des malades, OUI AUSSI !

Lever les tabous sur la psychiatrie, OUI, en relever d’autres, NON !

*L’Unafam : « À l’heure où les idées fausses sur la psychiatrie sont légion, comment lutter contre la stigmatisation avec un tel ‘divertissement’ sur une chaîne publique? Les médecins se battent pour que les jeunes soient pris en charge le plus précocement possible pour éviter des retards de diagnostic de 5 à 10 ans en moyenne actuellement. Comment convaincre un jeune de consulter avec une telle image de la psychiatrie? »

Marie-Luc Sechet Bodineau

Association SCHIzo’Jeun’S. Chateau-Gontier.
Membre du Collectif Schizophrénies.

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