« Paraître normale » [Cécile]
« Bonjour, je vous contacte pour apporter un témoignage ainsi que quelques réflexions sur un sujet qui me tient à cœur.
En effet, au quotidien je me dois de concilier une vie universitaire avec d’autres manifestations plus étranges. Si je peux utiliser une image pour visualiser mon parcours, je dirais que ce serait comme marcher sur un fil sans sécurités à 2000 m de hauteur, les mains attachées en devant danser la polka… ce n’est pas impossible, mais c’est risqué.
Paraître normale, et surtout ne pas trahir de souffrance, je m’y emploie depuis que j’ai récupéré de ma première décompensation (et même un peu avant).
Mon cursus universitaire est tout ce qu’il y a de plus classique, à une seule chose près, je souffre de troubles psychotiques depuis l’âge de 17 ans, qui se sont manifestés par trois crises majeurs et des moments de vulnérabilité plus intenses beaucoup plus fréquents.
Je tiens à témoigner, non pas pour dire que faire des études et avoir un travail c’est totalement possible et facile pour toutes les personnes qui souffrent de schizophrénie parce que je suis bien placée pour savoir à quel point c’est casse-gueule et que la stigmatisation est encore extrêmement présente.
Non, juste mentionner que peut-être il ne faut pas faire une croix sur tous projets de vie quand on a ce diagnostic, qu’au contraire il va falloir se battre beaucoup plus que les autres pour obtenir environ la même chose, mais qu’avec beaucoup de soutien de l’entourage, et aussi beaucoup de courage c’est possible.
Mon directeur de thèse m’a un jour demandé quelles étaient mes motivations pour faire une thèse de doctorat. J’ai baratiné quelque chose, mais j’avais envie de répondre honnêtement : il y a clairement une volonté de paraître normale, ça je ne peux pas le nier, et surtout une fois diplômée j’aurai aussi un grade de Docteur, comme les psychiatres (une motivation en béton à n’en pas douter).
Voilà, j’espère que mon témoignage pourra être un jour utile ;
Bien cordialement,
Cécile »