Que peut-on espérer d’un soignant en psychiatrie ?
Message aux étudiants, internes, aide-soignants et futurs infirmiers : n’oubliez pas que le soin en psychiatrie repose sur votre capacité à entrer en contact avec l’autre, cet autre qui a perdu temporairement contact avec la réalité et qui dépose en vous sa confiance et son espérance d’aller mieux.
La meilleure technique en psychiatrie c’est la parole.
Le soin en psychiatrie ne se résume pas aux actes techniques : l’injection et la distribution de médicaments, la prise de sang ou encore la mise sous contention mécanique. Vous n’êtes pas là simplement pour regarder le patient discuter avec le médecin psychiatre ou pour l’attacher quand il devient agressif.
Les maladies psychiques sont des maladies de la relation, des troubles du comportement qui expriment une difficulté d’être au monde, d’entrer en contact et en relation avec les autres. La maladie est aussi une solitude invivable.
Si beaucoup voient les malades comme des bêtes sauvages qui peuvent devenir incontrôlables et violentes, dîtes-vous que de l’autre côté, beaucoup voient les blouses blanches comme des automates dénués d’humanité.
La compétence d’entrer en relation avec le patient (voire le transfert) n’est pas réservée qu’au médecin psychiatre. La parole n’est pas un luxe mais la condition même du soin. Si les médicaments servent à apaiser l’angoisse et les symptômes, ils n’ont pas d’autre propriété que de permettre au patient de redescendre de son nuage pour entamer le vrai soin, celui qui lui permettra de mettre un sens à sa crise et de verbaliser son vécu.
Soigner c’est tout simplement redonner vie et voix au patient pour qu’il puisse rentrer en contact avec les autres.
Cela passe également par les médiations artistiques et corporelles.
Si la parole du patient est reine, il ne faut pas oublier celle des soignants et aide-soignants. Car ils souffrent souvent en silence du manque d’échanges et de sens dans leur pratique au quotidien. Contraints à attacher, à mettre à l’isolement à l’hôpital parce que les mots ne suffisent plus, incapables de désamorcer une situation et d’apaiser un patient par la parole.
Chaque malade a besoin d’être écouté et renforcé dans sa confiance en l’autre. Pour ne pas sombrer, le malade doit pouvoir se raccrocher à quelque humanité bienveillante et rassurante, de la part des soignants comme des autres patients.
Chaque soignant doit pouvoir être une présence parlante et rassurante, plus qu’un technicien du soin, il devrait pouvoir compter sur une solidarité collective pour résoudre les conflictualités et ne pas déconnecter son humanité quand il doit faire face à la terrifiante angoisse qui habite le malade.
La souffrance psychique fait peur mais ce n’est pas une fatalité quand elle trouve en l’autre une présence thérapeutique. La thérapie sous ses formes variées ne devrait pas se limiter à réparer les circuits de pensée défaillants comme on répare un ordinateur mais devrait permettre à chaque personne de trouver une place dans la société et dans la communauté des humains.
On peut mettre le patient au travail, lui trouver un logement, le rendre acteur de sa vie mais là où la médecine et la technique montrent leur limite c’est dans la mise en relation de la personne pour qu’elle trouve plaisir et envie d’être avec les autres et ne pas rester un patient réautomatisé et adapté.
Si certains n’ont pas envie de trouver un sens à leur souffrance ou fouiller dans leur passé, la thérapie doit tout de même permettre de retrouver la parole et un plaisir d’exister.
Joan
Christen Eddy
25 janvier 2020 chez 12 h 48 minL’isolement et la contention ne sont pas des méthodes de soin mais des méthodes barbares, elles empirent très souvent la santé du patient.
dominique
25 janvier 2020 chez 16 h 23 minPour moi c’est fondamental; qu’on me reproche parfois de « faire des entretiens trop longs » sous des prétextes que je n’arrive pas à entendre pertinents dans la plupart des cas même si je comprends l’idéologie qui est derrière ; que mes sujets successifs de réflexions, de ressentis, m’amènent à penser à la communication dans la famille, la communication entre les êtres, à l’empathie et ce qu’elle n’est pas ; et mon nouveau sujet, l’importance énorme du non-verbal. La parole n’est pas que les mots. C’est un peu inentendable de dire cela, mais la communication n’est pas que parole et la parole n’a de sens que justement parce qu’il y a autre chose qu’elle convoque, une intersubjectivité, une intersection culturelle-individuelle. Indivi-multiple.