Souffrance psychique, souffrance physique.
Que de fois l’on entend dire que les douleurs psychologiques ne sont pas aussi graves que les douleurs du corps, du cancer, des handicaps physiques.
Peut-on déjà vraiment les comparer ?
Une amie chère, un jour, a véritablement hurlé devant mes yeux ébahis, que mon enfer n’était rien en comparaison aux enfants battus, aux personnes cassées dans leur corps. Je fus qualifiée d’égoïste, et incendiée verbalement alors que j’expliquais mon calvaire.
Quelle surdité, de la part de beaucoup, lorsque vous criez à l’aide, que vos voix vous harcèlent. Alors vous expliquez vous être mutilée, vous être tapée la tête contre les murs, autoagressée.
Mais sans doute est-ce en raison de nos appels successifs, que nous sommes qualifiées de personnes se victimisant !?
L’abandon.
Oui, il y a l’hôpital, lieu d’accueil, que je remercie. Mais ainsi plus de dérangements. L’on n’a plus à voir notre visage clos, vague, ou crispé de tourments, déformé par les cris. La bave au coin des lèvres s’invite aussi.
Nous sommes calmes, l’âme « morphinée » grâce aux pilules d’oubli.
Bien sûr, les plaies du malade psychique ne se voient pas, mais comment peut-on délibérément nous dire de cesser nos larmes torrentielles alors que les douleurs des harcèlements intérieurs sont un brasier de tortures ?
Que l’on nous gave d’antipsychotiques est une chose qui peut se comprendre, vue du côté du corps médical, ou être tolérée un temps, mais ces pratiques nourrissent l’exclusion, l’endormissement tant du dit « malade » que du cercle familial, social.
Toujours, tout va vers le plus fort, le plus combatif, et ces critères sont donnés, à juste titre, aux souffrances physiques, aux cicatrices de l’acte chirurgical, aux douleurs de la chimiothérapie.
Je n’aurais pas ce courage, d’ailleurs, je cesserais de me battre. Mais pourquoi ne veut-on pas entendre, non plus, que les molécules destinées à « soulager » nos terreurs, détruisent notre cerveau, nous mènent vers de grosses pathologies… physiques.
N’est-t-il pas sensé de se dire alors, que pour en arriver là, il fallait bien que l’urgence le nécessite. Oui, je conteste ces méthodes lorsqu’elles sont l’unique moyen, et le critère absolu, mais nos cris de souffrance n’en sont pas moins réels.
De plus, nos traitements nous font dormir. Grossir aussi puisqu’ils sont des inhibiteurs de la satiété. En conséquence, nous sommes vus comme des paresseux, des morfales. Les allocations, qui nous permettent de vivre, nous sont renvoyées au visage comme un sacrifice fait par la société, pour nous, dits « inactifs » ou dépendants.
Je remercie, bien sûr, de recevoir cet argent.
Nos parcours sont des chemins de croix, et l’humanité existe par nous, aussi.
Un être se blesse au corps et hurle de douleur. Nous sommes blessés au cœur, à l’âme, nous le manifestons de la même façon. La différence est que l’on ne voit pas notre fracture, car elle est loin en nous, invisible. Le langage que nous utilisons souvent pour montrer que c’est tout autant l’enfer, est de nous scarifier. Là, la psyché pose son empreinte, sa blessure, alors on voit. Ou pas.
KERIDWEN
(illustration Robot Hugs)
Caroline
7 avril 2020 chez 8 h 50 minLa souffrance psychique ou psychologique ou la souffrance physique ce sont des douleurs et il est dommage d’être dans une société ou il est demandé de devoir les justifier.
C’est comme les douleurs physique et les discours « c’est dans la tete » dire que c’est dans la tete simplement parce-que ce n’est pas compris c’est si simple !!
Pourquoi vouloir faire une comparaison des souffrances ? pour le bien de qui ?
Merci pour votre texte.
BAZIN
6 septembre 2020 chez 21 h 00 minBonjour Caroline. Ne pas être prise au sérieux, estimer que la souffrance psychologique n’existe pas ou n’est pas crédible parce ce qu’elle ne se voit pas dans la chair, est une souffrance supplémentaire cruelle. Si mes souffrances « invisibles » n’avaient pas fait l’objet de railleries, n’étaient pas passées au second plan, n’avaient pas été ignorées, je n’en serais pas arrivée à écrire ce texte qui souhaite souligner que les cris, les suicides, les têtes contre les murs, sont des appels au secours dans un « je vis l’enfer » . Je conçois que ce soit incompréhensible. Donc je témoigne d’un indicible du mieux possible, avec un langage autre que les cris, et l’auto agression, et ces explications sont une aide et une sorte de thérapie, et les partager est à mes yeux d’une grande importance. J’existe, je suis un être humain, ce qui n’est pas cru non plus lorsqu’on est dans la case de malade mentale. Ecrire et souligner la douleur psychologique, est aussi une façon d’éviter de sombrer dans le souhait d’en finir qui serait la preuve fatale que je souffre l’intolérable. Là je serais crue(?) dans le comble de l’atrocité de cette non reconnaissance d’un « je n’en peux plus » qui était trop « abstrait »..Merci Caroline d’avoir lu mon article, et pour votre commentaire.. belle soirée à vous..
Rita
11 octobre 2020 chez 23 h 02 minCela fais écho en moi ce soir, mes cris étouffés sont seuls manifestations extérieures.. crise ou boule de piquant comme je nomme ces moments de solitude malgré moi. Un mal de vivre ancré profondément et ce nuage noir qui me prends à la gorge parfois sans crier gare, sommeil ainsi volé et épuisements au bout du chemin.
Navré mon texte ne sera pas plus joyeux que le votre mai il témoigne également…
Bien à vous.