« Vivre sans traitement » [Alain Karinthi]
« Petit témoignage concernant le traitement obligatoire et à vie quand on porte un trouble psychique sévère, schizophrénie, bipolarité de type 1 (ou maniaco-dépression) et sur la question de la rémission ou du rétablissement :
Peut on vivre une rémission totale de ces troubles?
Ces personnes, dont je suis, vivent une rémission avec une vigilance à maintenir, oui, mais alors cette rémission est-elle une rémission partielle?
Non, nous vivons une rémission tout court…
Une vigilance à maintenir oui, mais comporte-t-elle forcément un traitement médicamenteux psychotrope puissant? NON!
Je suis étonné de voir à quel point la question de l’obligation de la médication, et même de la médication à vie, est tranchée de façon nette par la positive… Et par une écrasante majorité des soignants et des proches…
Nous sommes beaucoup pour qui le chemin du rétablissement a apporté une stabilité de vie et notamment au niveau des symptômes nous permettant de vivre sans traitement…
C’est mon cas, je vis sans traitement et je ne suis pas opposé aux traitements, ils m’ont permis de construire, de travailler sur moi et je m’en passe aujourd’hui…
Je dois dire que si j’ai réussi ce chemin, c’est en grande partie parce que je n’ai pas eu à le faire seul, que je n’ai pas eu, après avoir découvert le rétablissement et travaillé comme pair-aidant ou médiateur de santé pair, comme nous sommes appelés, à le cacher ou à subir la crainte de mon entourage.
Avant cela, j’avais arrêté les traitements entre 20 et 30 ans à plusieurs reprises, seul, en le cachant, et souffrant du manque de neuroleptiques, terriblement, et ce furent des échecs…
J’ai vécu cinq périodes d’hospitalisation sous contrainte entre 19 et 30 ans, recouvrant en tout sept ou huit mesures.
Nous sommes nombreux à devoir taire notre réalité de vie car l’avis de nos proches est si tranché sur cette question, comme l’avis de la société, ou l’avis de la majorité des médecins ou infirmiers et autres soignants, que leur angoisse si ils savent est tellement dure à supporter qu’elle nous hante, nous habite, et même si notre choix leur est inconnu.
Nous avons besoin d’être soutenus, supportés, de sentir que l’on croit en nous.
Qu’il est dur de garder l’espoir quand même nos proches ne croient pas en nous !
Comment assumer nos envies et travailler à construire nos vies quand, si nos espoirs et volontés dépassent le cadre limité (très limité) de l’idée reçue sur nos possibles, si ils dépassent ce qui est considéré comme possible pour une personne atteinte de troubles psychiques sévères, un « psychotique », alors cette attitude est considérée comme un symptôme, ou comme une attitude annonçant la rechute ou encore une preuve de déni?
J’ai bénéficié du soutien de mes pairs avant que ma famille, face à l’évidence de mon processus de rétablissement en cours, ne refasse confiance en mes possibles…
Je ne vis pas une histoire exceptionnelle: OUI j ai été diagnostiqué psychotique, d’abord schizo-affectif puis maniaco-dépressif de forme très sévère et traité avec force traitements.
OUI, comme mes pairs, j’ai vécu l’internement sous contrainte, l’isolement, la contention et les injections intramusculaires forcées.
Oui, comme eux, j’ai pris du poids, beaucoup de poids, plus de 110 kilos quand je n’en faisais que 65 à 19 ans…
Aujourd’hui, j’ai une vie de citoyen actif, avec des activités professionnelles et des engagements associatifs, et dans ce qui me passionne:
Avec des amis, j’ai fondé une association développant une zone de chill out (zone de relaxation) de création artistique et d’art du cirque (jonglerie enflammée notamment) ainsi que de réduction des risques liés aux consommations, tout cela en milieu festif (festival de musique, électronique en majorité et conventions de jonglerie aussi).
Je suis responsable du pôle réduction des risques: la psychiatrie m’a envoyé tellement de produits que je suis devenu expert dans l’effet des produits psychoactifs et leurs conséquences sur le psychisme…
Je me suis formé aussi, en accompagnant professionnellement des personnes issues de la rue et consommatrices et puis j’aimais la fête techno, mais ces environnement m’étaient proscris, vu mon trouble… Une stupidité de position thérapeutique basée sur des valeurs subjectives éloignées de ma réalité personnelle…
Mon histoire n’a rien d’extraordinaire, on a juste cru en moi. Beaucoup de mes pairs vivent la même histoire que moi et y compris au niveau des traitements…
Sans soutien c est juste impossible ou très difficile à réaliser.
Ouvrez les possibles, il n’y a pas que ceux atteints de troubles, vos proches peut être, qui doivent avoir espoir !
Si vous, leurs proches, ne croyez pas en leur rétablissement, alors peu de chance qu’ils y arrivent seul et ça c’est une certitude, basée sur des preuves scientifiques, pas uniquement de mon histoire, je suis juste un exemple, il en existe tant d’autres, contraints de se cacher… »
Verde Lucas
29 décembre 2019 chez 1 h 59 minComment avais vous fais sans traitement exactement car je le suis moi aussi fin il paraît
Nounou
4 janvier 2020 chez 5 h 05 minBonjour. Je suis à la recherche de la meilleure solution pour mon fils de 19 ans qui vient d’être détecté et sous médicaments forts qui l épuisent. J ai besoin d aide. Pouvez vous me dire où vous avez été suivi et aidé pour pouvoir en arriver à être soigné sans médicaments. Merci d avance.
Odile
22 avril 2020 chez 22 h 47 minbonjour Nounou, vous avez de la documentation sur le site d’entraide Neptune. J’ai aussi fait une vidéo sur le sujet si ça peut vous aider : https://www.youtube.com/watch?v=9BoDG26mGkQ
bon courage
Clo'
7 avril 2020 chez 23 h 40 minMerci pour cette dose d’espoir !
Ange
25 mai 2020 chez 15 h 41 minBonjour, j’ai exactement le même profil, depression quasi toute ma vie, puis j’ai fait juste une crise de manie mais tellement énorme que j’ai cru de jamais revenir donc diagnostiquée bipolaire et skyzo affectif (je comprends pas ce terme)…je suis bipolaire ou skyzo ? J’ose même pas en reparler avec mon pys, tellement j’ai peur de la réponse.
Bref J’ai pas compris pourquoi à la fin vous dites contraints de se cacher?,
Se cacher de ne pas vouloir prendre de traitement ?
C’est vrai que que les médecins ne l’envisage pas une seconde selon le cas.
Mon frère par contre lui a eu ce choix, je pense c’est du à son parcours, il a fait la même crise que moi mais en moins fort, tout de même impressionnant, il est jeune et pas de réel dépression donc ils disent bouffées délirantes, on sent bien qu’ils n’arrivent pas à poser un diagnostique clair, du fait de son jeune âge et donc aucun passif. Bise
Ange
25 mai 2020 chez 15 h 44 minJuste pour être avertie des nouveaux messages
Bipoline
25 juin 2020 chez 19 h 09 minBonjour, je voulais savoir quels étaient les effets psychoactifs du lamotrigine ? Je suis stabilisée, la question se pose mais je n’arrive pas a savoir si je vivrais mieux avec que sans. J’ai tellement peur d’une rechute …
Véronique
26 janvier 2021 chez 9 h 46 minBravo! Quel chemin. Je vous ai croisé parfois aux réunions d’entendeurs de voix et ai toujours été très touchée par votre histoire, votre combativité, votre détermination et vos failles. J’accompagne quelqu’un en grande difficulté et j’ai l’impression que pour cette personne c’est la volonté qui est touchée. Même sans médicaments depuis plusieurs années il y a comme un endormissement, ou plutôt une passivité dans les actes, pas dans la torture mentale. A se demander si parfois nous les proches n’en faisons pas trop. Bon on pourrait en reparler. Merci pour votre réponse
Gaudé
22 mars 2021 chez 19 h 20 minMerci infiniment pour ce témoignage. Oui, l’idée du rétablissement est inconcevable en matière de santé psychique. Et c’est un dur combat que d’en parler. Un pétage de plomb psychotique et hop, case bipol. 1 à vie, médocs à vie.
Comme vous, je m’en suis « sortie ». Après nombreux échecs j’ai mis fin à mon traitement depuis deux ans et demi, et un an après je me suis sevrée en alcool tabac et canabis. Rester lucide et ne pas dénigrer les traitements, ne jamais inciter ses pairs à mettre fin à leur traitement, mais qu’ils sachent seulement que, dans des conditions très particulières, c’est possible de vivre avec la maladie et sans médicaments. Aucun médecin n’ose affirmer cela, nous sommes des témoins et peut-être des passeurs. Alors qu’aujourd’hui, dans un contexte extrêmement difficile avec la crise sanitaire, les entrées en psychiatrie augmenteraient de 30 pour cent …
piouitelavion
18 janvier 2022 chez 2 h 57 minJ♥
Marin
22 février 2022 chez 14 h 52 minBonjour! Je vous remercie aussi de partager vos expériences. Moi, je suis hospitalisé avec un diagnostic de schizophrénie avec le risperdal comme neuroleptique qui me laisse complètement aplatie et légume. Ils ont decide d’envoyer une infirmière a une Maison Relais où ils vont m’envoyer pour s’assurer que je prend le médicament, mais je ne veux pas le prendre. Alors la seule solution envisageable c’est de ne pas y aller vivre là-bas et d’y aller vivre chez un ami qui est prêt à m’heberger. Pensez-vous qu’ils vont aller me chercher, la police par exemple pour me ramener à nouveau à l’hôpital psychiatrique? Je ne veux pas du tout prendre ces médicaments à ma sortie d’ici. Merci bien
Florine
1 avril 2022 chez 17 h 35 minC’est des dégénérés de nous mettre sous camisole chimique vraiment
Julie BB
15 avril 2022 chez 10 h 50 minBonjour,
Mon mari est actuellement en « crise » psychotique après arrêt de ses médicaments (par paliers mais sur seulement 3 mois et seul sans aucun accompagnement). Il est cependant assez calme, dans sa bulle. Il ne travaille pas en ce moment ce qui lui permet de rester à la maison où il semble se sentir en sécurité. Jusqu’à présent, il était opposé à toute démarche de soins car profondément traumatisé par des hospitalisations sous contrainte à répétition depuis 13 ans et des traitement lourds. L’été dernier il a fait l’objet d’une énième hospitalisation qui heureusement a pu aboutir vers la levée de son injonction de soins qu’il attendait tant et la possibilité d’aborder les choses différemment. Mais il persistait à affirmer qu’il n’avait pas besoin d’être accompagné sur le plan psychologique et émotionnel. Il a donc cessé son traitement et décidé d’arrêter les séances mensuelles avec sa psychiatre. Mais ô miracle! cette semaine, alors qu’il est en rechute depuis environ un mois et demi, et après reconnaissance de certains symptômes, il vient d’accepter de rencontrer un psychothérapeute de notre ville (TCC et EMDR). Il l’a choisi sur une simple intuition. Je suis très heureuse de ce pas franchi mais je me demande si ce thérapeute a les bonnes compétences. Croyez-vous que cela soit suffisant en situation de « crise »? ou bien croyez-vous que cela puisse au moins lui offrir un peu d’espace d’écoute et de bienveillance dont il semble tant manquer et que ce sera déjà pas mal?
Dumont
6 mai 2022 chez 20 h 52 minDu coup les psys sont au courant que vous ne prenez pas votre traitement ? Qu’en disent-ils ?
François
6 juin 2022 chez 19 h 57 minBonjour,
Je suis sans traitement depuis de nombreuses années et je vis, j’ai 46 ans, des hauts des bas comme tout le monde…par contre je ne travaille pas, plus la force plus l’envie aussi. J’étais fonctionnaire et ai subit un harcèlement moral violent, j’ai tout lâché car pas l’envie de retourner en psychiatrie qui m’a plus bousillé qu’autre chose!
Je n’ai eu aucunes reconnaissances que cela soit médecins, haut fonctionnaires, syndicat ,lors des comités. Cette société est d’une hypocrisie incroyable envers les gens fragile psychologiquement, à part proposer la solution du tout chimique il n’y a rien! Pour obtenir ne serait ce qu’une pension d’invalidité, c’est tout à fait inadmissible ! Cette société m’a en quelque sorte bousillé et continue de le faire en me renvoyant vers pôle emploi! Alors que je suis jugé inapte dans la fonction publique !
Je suis aussi la preuve vivante que sans traitement on vit même très bien, mieux je penses même…car peu de patients s’accommode de ces médicaments, une grande majorité veut les arrêter.
Je terminerais sur une citation de Coluche, A la télé ils disent tous les jours : « Y a trois millions de personnes qui veulent du travail. » C’est pas vrai : de l’argent leur suffirait.