« Femmes Psychiatrisées, Femmes Rebelles », Martine Delvaux [livre]
Précisons que les mots folles et fous sont utilisés dans cet article avec une tendresse et un respect infinis. Ils ne s’agit pas d’éveiller la fougue des militants du tout pathologique.
« Vous m’avez jeté votre monde au visage comme un seau d’eau, je ne trouverai jamais le chemin, je suis perdue. » Valérie Valère
On parle de la folie qui est devenue pathologie, des fous qui sont devenus des malades, mais que dit-on des folles ?
Y-a-t’il une spécificité de la folie au féminin ?
Quels rôles les femmes ont-elles joué dans les grandes transitions du regard que l’on porte sur la folie, sur l’internement et sur la pathologie psychiatrique ?
Les grandes folles de l’histoire comme Claudel, Zelda Fitzgerald, comme Dora qui inspira Freud ou Mary Barnes qui joua ce rôle pour Lacan, ont peut être marqué la lecture de la psychose plus que l’on ne l’imagine. C’est du moins la proposition de Martine Delvaux dans son livre Femmes psychiatrisées, Femmes rebelles.
Elle soulève deux aspects intéressants. Beaucoup de thérapeutes notamment Freud, Lacan, Charcot, Jung ont eu pour patientes des figures féminines, des muses qui ont participé à définir certains aspects de leur approche thérapeutique. En ce sens, ces femmes ont participé à l’élaboration de leur théorie. Mais elles ne se sont pas contentées d’inspirer passivement l’analyste. Elles ont aussi écrit des témoignages littéraires, des récits d’internement à travers lesquels elles se sont réappropriées leur expérience.
L’écriture comme acte de rébellion face à la toute puissance du regard de celui qui écoute, dissèque et aspire à soigner.
Le livre de Martine Delvaux est intéressant même s’il est écrit de façon un peu ardue, il y a de beaux extraits de textes des femmes psychiatrisées. Il y a cette phrase à la fois terrible et poignante de Valérie Valère qui exprime sans doute quelque chose qu’ont ressenti tout ceux qui un jour se sont retrouvés derrière les murs d’un asile: « Vous m’avez jeté votre monde au visage comme un saut d’eau, je ne trouverai jamais le chemin, je suis perdue. »
Retrouver le chemin coûte que coûte et se réconcilier avec le monde, c’est ce que devrait aider à faire une vraie belle approche thérapeutique.