Portrait d’Iman
Comme Iman, fais-toi tirer le portrait par Comme des fous en répondant à ces 5 questions.
Quelles sont tes inspirations dans la vie et à quoi tu aspires?
Je me suis rendu compte que ma source principale d’inspiration était la nature humaine.
Je dirais plutôt qu’elle me fascine parce qu’elle m’intéresse autant qu’elle me révolte.
Je crois que depuis que je suis petite j’observe beaucoup mes congénères et je ne cesse de chercher à comprendre tous les rouages, principalement psychologiques de cette espèce !
Les personnes qui m’ont inspirée avaient toutes une très grande fragilité et étaient toutes des artistes. Comme je ressentais absolument tout par les pores de ma peau, je me suis mise à danser pour tenter de donner sens à toutes les émotions qui me submergeaient.
Lorsque je n’en peux plus, je retourne dans le nid de la Nature pour écouter ce qu’elle a à me dire.
J’aime l’intimité, j’aime le partage et les rencontres, j’aime énormément rire, sans-doute parce que j’ai beaucoup trop pleuré.
Je passe beaucoup de temps à écrire, à danser et à aimer. Aujourd’hui, l’art et l’humour sont des compagnons très précieux.
Comment décrirais-tu ton métier et pourquoi tu l’aimes?
J’ai plusieurs cordes à mon arc mais l’activité que j’ai finalement le plus développée est la danse, l’enseignement de la danse. Laquelle vous demandez-vous ?
J’ai enseigné les danses orientales pendant 16 ans ( le style égyptien particulièrement mais pas seulement ). C’était passionnant mais difficile à la fois car je ne me reconnaissais pas dans les clichés qu’elle véhiculait et qui ont la peau dure. Je me suis beaucoup questionnée.
Finalement, j’ai créé mon approche, je suis sortie du cadre imposé et je me suis libérée de beaucoup de choses.
La Danse Source puise à la source des danses et des musiques du monde entier pour permettre de trouver en soi la voie de la danse. A la source de soi et du monde, trouver le chemin ici et maintenant, de notre propre corps dansant.
J’ai mis en place il y a peu des ateliers de danse thérapie car je suis convaincue que la restauration de ce que j’appelle « la Pyramide du Soi » passe par le corps : estime de soi, confiance en soi et affirmation de soi, sont toujours la cause de grands troubles ou dysfonctionnements psychiques.
Je m’intéresse aussi beaucoup aux corps handicapés et je souhaite permettre au plus grand nombre de goûter à la joie de danser et d’apprendre de tout ce merveilleux patrimoine que constituent les danses dites du monde.
Je pourrais en parler des heures mais je suis contrainte ici de synthétiser. J’écris des articles régulièrement pour pouvoir exprimer tout cela !
Que penses-tu du monde de la santé mentale?
C’est un sujet qui me passionne et me préoccupe tous les jours car je souffre moi-même de bipolarité et de dépressions.
Bien que je sois stabilisée, c’est forcément un sujet essentiel pour moi, tant d’un point de vue personnel que professionnel.
Je suis passée par toutes les phases, tout le parcours médical et psychiatrique, les hospitalisations, les doutes, les rejets puis l’apprentissage.
Car oui, finalement je peux dire aujourd’hui que j’ai appris considérablement sur moi-même, sur la pathologie et sur les autres.
Pendant longtemps je me suis sentie des deux côtés du mur : j’étais à la fois la personne souffrante et la thérapeute en devenir.
Il m’a fallu des années de travail sur moi pour que ce conflit n’en soit plus un.
Le diagnostique une fois posé, après bien des années d’errance, a été le point de départ de ma résilience.
Rien ne s’est fait facilement mais j’ai tellement appris !
Je continue d’apprendre, de grandir et d’avancer et je me suis réconciliée avec celle qui souffrait. La créativité a joué là encore un grand rôle mais pas seulement, la thérapie comportementale et cognitive avec mon psychiatre m’a donné de véritables outils que j’utilise à présent en danse thérapie et bien entendu dans ma vie quotidienne.
Il y a tant d’améliorations à apporter dans le monde de la santé mentale.
Je lutte beaucoup contre la stigmatisation, les idées reçues et les fausses croyances. Je suis pour que diverses compétences se rencontrent afin de proposer des soins complémentaires aux patients.
Je ne veux pas être « anti » je veux travailler « avec « .
Qu’est-ce qu’on peut tirer de positif de la folie?
La folie, c’est comme pour tout : si elle est acceptée, canalisée, prise en considération et prise en charge, elle peut être une grande source de créativité. La folie est partout.
Lors de ma toute première hospitalisation, j’avais 17 ans, j’ai dit à mes parents en quittant la clinique que « les fous étaient tous dehors » ! Je quittais un univers clos dans lequel j’avais rencontré une telle diversité humaine et une telle richesse qu’il me semblait que tous les gens que je voyais dans la rue n’étaient pas normaux. La norme est forcément relative. Pour avoir côtoyé les deux mondes, je peux dire aujourd’hui qu’il n’y a pas plus de folie d’un côté du mur.
Le » monde des fous » m’a appris la tolérance inconditionnelle, l’acceptation de toutes les différences et le non jugement.
J’évite juste d’être souffrante lorsque je suis dans mon rôle d’enseignante ou de danse thérapeute car je sais que pour bien faire, il faut être en équilibre soi-même !
Alors la folie… oui j’ai dû être folle dans mes comportements, mes réactions, dans les diverses expressions de ma souffrance, mais je ne me suis jamais considérée comme folle.
La folie pour moi, c’est de laisser ce monde et cette planète se casser les jambes sans agir…
Je n’ai jamais été aussi créative que depuis que j’ai compris de quoi je souffrais.
Pourrais-tu devenir un jour ministre de la santé mentale et sinon qu’est-ce que tu lui demanderais?
Non, je ne pourrais pas devenir ministre de quoique ce soit car je ne le souhaite pas. La politique ne m’intéresse pas de cette manière.
La politique, je l’aime dans les actions que je mène à mon tout petit niveau et ça me va bien comme ça.
Si j’en avais l’occasion je lui dirais de donner beaucoup de moyens pour la santé et particulièrement pour la santé mentale, car je sais que ça n’ira pas mieux.
Il faut absolument s’occuper de toutes ces personnes qui ont subi des guerres et l’exil, de toutes ces personnes qui souffrent et qui sont isolées, de tous ces jeunes qui vont très mal.
Beaucoup de moyens, c’est essentiel !